Défense de deux hommes agressés dans une grande surface
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Serris : la victime avait passé trois semaines dans le coma après un coup de pied à la tête
Le tribunal correctionnel de Meaux s’est penché sur une altercation survenue le 19 juin 2022 dans l’hypermarché Auchan du Val d’Europe. Quatre Afghans s’y étaient violemment battus.
« Cet homme est tombé dans le coma, il n’est pas passé loin de mourir. Si ça avait été le cas, c’est devant une cour d’assises que vous auriez comparu. Tout ça parce qu’il vous avait insulté. Est-ce que ça valait le coup ? » Par cette question, la présidente Caroline Fichet tendait une perche au prévenu, jugé mardi par le tribunal correctionnel de Meaux pour des violences commises dans l’hypermarché Auchan du Val d’Europe, à Serris, le 19 juin 2022. Ce jour-là, une bagarre avait éclaté entre quatre Afghans, deux contre deux. Plongeant l’un d’eux dans le coma pendant trois semaines.
La magistrate, qui cherchait une once de regret chez le prévenu, insistait : « Vous lui avez donné un coup de pied dans la tête. Pourquoi ce déchaînement de violences dans un magasin ? On n’est pas dans la légitime défense, on est dans la vengeance, là. » Seule réponse de l’intéressé, via un interprète en langue persane : « J’avais peur. » L’origine de l’altercation, l’histoire ne la raconte pas. À l’audience, les deux prévenus – des habitants de Magny-le-Hongre et de Bussy-Saint-Georges âgés de 23 et 22 ans – ont évoqué un guet-apens, à la suite d’un contentieux opposant l’un d’eux à un cinquième Afghan. Tandis que les victimes ont expliqué avoir été agressées à l’occasion d’une rencontre faite par hasard.
« Pastèque, pas pastèque ? »
Les images de vidéosurveillance étaient au cœur des débats, pour tenter de comprendre qui avait commis les premières violences. Seule certitude : si tout a commencé par un coup de pastèque au menton ou une bousculade, l’épilogue est terrible. La principale victime a subi une « balayette aérienne », qui l’a fait chuter au sol, avant de recevoir un coup de pied au visage. L’un des prévenus n’en a pas démordu : « On ne peut pas rester sans rien faire quand on se fait insulter. » Le substitut du procureur, Alexandre Boulin, se demandait s’il aurait justifié son comportement de la même manière devant une cour d’assises, en cas de décès de la victime : « Le tuer, c’est une solution ? »
Me Alice Ouaknine, l’avocate des parties civiles, a senti ses clients « frustrés et en colère » de se retrouver en position d’accusés : « Ce jour-là, ils se sont défendus de manière proportionnée. Personne n’attendait personne. » Et de rappeler que la principale victime a subi trois opérations et des semaines d’hospitalisation. Avant de prendre ses réquisitions, le substitut du procureur est revenu sur la procédure : alors que le parquet avait prévu de juger les prévenus en comparution immédiate, un juge des libertés et de la détention ne les avait pas placés en détention provisoire. Renvoyant l’affaire en juge unique.
L’avocat de la défense a plaidé la légitime défense
« Je ne vais pas me baser sur la pastèque, pas la pastèque, la bouteille, pas la bouteille. Je vais m’en tenir à la vidéo », a cadré le parquetier. Avant de revenir sur les images de vidéosurveillance et de regretter l’absence de remise en question des prévenus, contre lesquels il a requis deux ans de prison, dont un ferme à effectuer en semi-liberté, et quatorze mois de prison avec sursis simple. Il a également requis l’interdiction de paraître à Auchan pendant trois ans.
Me Philippe Jalley, l’avocat de la défense, a plaidé la légitime défense. Pour lui, les premières violences ont été commises par les parties civiles : « Je ne vais pas vous dire que la réaction a été intelligente. Mais les violences ont été réciproques. » La juge a prononcé une peine de dix-huit mois de prison, dont six ferme à effectuer sous bracelet électronique, et une peine d’un an de prison avec sursis, à l’encontre des deux hommes qui n’ont plus le droit de paraître dans l’hypermarché.